sameeg a écrit :Stiegler notre grand penseur/bullshiteur ?
Ouais bon, ok, il se la raconte un peu (beaucoup ?), mais globalement ça va, non ? Disons qu'on a vu largement pire en bullshit, et qu'il est plus à l'aise pour parler des mouvement macroscopiques sur le long-terme et sans aller trop dans le détail, et pour parler concepts philosophiques - ce qui est son domaine. Et je n'ai pas l'impression qu'il se revendique du mouvement hacker, mais peut-être j'ai raté un épisode. Que certains essaient de le mettre dans cette case ... Dans un pays où Fillon pense pertinent de dire qu'il est geek parce qu'il a un iphone et deux macbooks, ce n'est pas une surprise
Et puis, bon, il tape sur Laurent Alexandre, donc, foncièrement, ça doit être un mec bien
Mais je comprends l'idée : pas un bon représentants pour le mouvement hacker / le monde numérique, effectivement ça serait une belle erreur de casting.
Après, plus généralement, ce qu'il dit sur le numérique n'est pas aberrant. Mais, surtout, ce qui me gêne, c'est l'argument "il ne sait pas faire ceci ou cela donc il n'est pas légitime", je ne suis pas d'accord. C'est quoi le critère ?
sameeg a écrit :Évidement on va pas demander de savoir réciter par cœur le man de tcpdump [...] Parce que c'est la Loi quand même maintenant.
Il y aurait tellement de choses à dire sur cette affirmation ...
Je vais me contenter de dire que, non, je ne suis pas d'accord. Genre, radicalement pas d'accord. J'ai un peu peur de sur-interpréter et de faire un amalgame ... Non, en fait je suis sûr de sur-interpréter et de faire un amalgame
mais j'ai déjà vu passer d'autres affirmations du même type récemment, donc j'en profite, je rebondis sur la tienne, rien de personnel, ok ?
Il faut que ça sorte. Disclaimer à tout hasard : Je ne m'en prends pas à toi, je m'en prends à ton affirmation.
(Vu qu'on est dans un topic discussion philosophique, je me permets de répondre dans ce sens
)
D'une part : Arrêtons de nous mettre sur un piédestal, c'est insupportable ! Moi ça me gonfle à un point que vous ne pouvez pas imaginer
D'autre part : Je ne pense pas que les non-hackers soient incapable de dire des choses correctes sur les hackers. Juste, là maintenant, aujourd'hui, yen a pas. Donc, si les hackers veulent avoir une représentation fidèle, pour le moment ils n'ont pas d'autre choix que de parler par eux-même, et ce n'est peut-être pas plus mal. Plus efficace, aussi, certes, mais pas intrinsèquement obligatoire. Et selon moi, cette situation est purement contingente.
Et ne pas oublier que, au-delà de la compétence, il y a aussi la volonté et l'agenda politique. Si un truc-o-logue a une idée pré-conçue (ou une demande ? On ne peut rien exclure) et veut montrer que les hackers sont ceci ou cela, qu'il soit hacker lui-même ne va pas l'empêcher (techniquement) de faire en sorte que ses études poussent son idée. La compétence technique n'est pas un blanc-seing politique ou idéologique (Oh ? Monsieur Villani ? Vous ici ?). Faire partie du milieu baissera la probabilité de volonté malveillante, c'est tout (et c'est déjà bien). Et puis, des gens peuvent faire partie d'un milieu tout en en partageant pas les valeurs, mais être en sous-marin, ou bien être tellement à côté de la plaque qu'ils ne se rendent plus compte (vu qu'on est le dans le name-dropping : Snoop Dogg qui se fait tej' par les rastas est un bon exemple).
Par ailleurs encore, et là je sors du sujet ... mais peut-être pas tant que ça ? Cette affirmation "le code c'est la loi" me gêne parce qu'elle sous-entend que les "développeurs" (au sens large) ont un pouvoir politique. Selon moi c'est faux. C'est se mentir que de dire ça, c'est une illusion. On a l'impression qu'on a le pouvoir parce que le monde est conçu pour nous, ou plus exactement que nous sommes adaptés à ce monde hautement technologique dans lequel nous vivons. Mais ce n'est pas nous qui avons le pouvoir. Dans Google, ceux qui prennent les décisions et qui autorisent à publier les services de Google ce sont les dirigeants, pas les grouillots de base, aussi talentueux / disruptifs / compétents / altruistes / volontaires / non-conformistes / rebelles soient-ils. Le code - plus généralement la technique - est un outil de pouvoir et de domination, oui. Mais ce n'est pas le pouvoir, et il ne se substitue pas aux autres outils de pouvoir. Et même, hors milieu hacker, il est totalement inféodé aux autres pouvoirs.
Et, selon moi, un des (nombreux) buts de lieux comme l'Electrolab c'est de permettre à un maximum de gens de comprendre cela, et de se défendre contre cela. C'est à très petite échelle, mais c'est mieux que rien, et c'est déjà ça.
En fait, plus généralement, c'est selon moi un des but du hacking : changer l'attribution de cet outil de pouvoir. En tous cas c'est comme ça que je le ressens.